Le Cambodge et 14 autres d’Asie et du Pacifique ont signé le 15 novembre 2020 un accord de libre-échange à l’occasion de la clôture d’un sommet virtuel de l’ASEAN qui avait débuté jeudi 12.
Signature après huit ans
Les négociations sur le Partenariat Régional Economique Global (PREG) ont duré huit ans. L’accord a finalement été signé dimanche en marge du sommet virtuel de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est, organisé par le Vietnam. « Je suis heureux qu’après huit années de négociations complexes, nous puissions terminer officiellement aujourd’hui les négociations du PREG », a déclaré le Premier ministre vietnamien Nguyen Xuan Phuc, dont le pays assure actuellement la présidence de l’ASEAN.
« Dans les circonstances actuelles, le fait que le PREG ait été signé après huit ans de négociations apporte un rayon de lumière et d’espoir au milieu des nuages », a déclaré le Premier ministre chinois Li Keqiang après la signature virtuelle.
« Cela montre clairement que le multilatéralisme est la voie à suivre et représente la bonne direction de l’économie mondiale », a-t-il ajouté.
« Après huit ans de négociations avec le sang, la sueur et les larmes, nous sommes enfin arrivés au moment où nous scellerons l’accord RCEP », a déclaré le ministre malaisien du Commerce, Mohamed Azmin Ali.
À propos
Le pacte commercial a été conçu lors du sommet de l’ASEAN en 2011 à Bali et les négociations officiellement lancées lors du Sommet de l’ASEAN 2012 au Cambodge. L’accord commercial vise à créer une gigantesque zone de libre-échange entre les 10 états de l’Asean (Indonésie, Thaïlande, Singapour, Malaisie, Philippines, Vietnam, Birmanie, Cambodge, Laos et Brunei), la Chine, le Japon, la Corée du Sud, l’Australie et la Nouvelle-Zélande. Ce Partenariat Régional Economique Global (PREG) devient donc l’accord commercial le plus important du monde et concerne plus de 2 milliards d’habitants, soit 30 % de la population mondiale, avec un produit intérieur brut combiné d’environ 26,2 billions de dollars américains, soit 30 % du PIB mondial et 28 % du commerce de la planète.
Outre le libre-échange, l’accord comprend également la propriété intellectuelle, les télécommunications, les services financiers, le commerce électronique et les services professionnels, mais exclut tout ce qui touche à la protection des travailleurs et à l’environnement.
Le PREG établira des règles dans une vingtaine de domaines et supprimera les droits de douane sur 61 % de ces importations en provenance des membres de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est, de l’Australie et de la Nouvelle-Zélande, ainsi que 56 % de la Chine et 49 % de la Corée du Sud. En ce qui concerne les exportations japonaises, l’accord devrait éliminer les droits de douane chinois sur certains pétoncles au cours de la onzième année après son entrée en vigueur, un droit sud-coréen sur les bonbons et les taxes indonésiennes sur certains bœufs immédiatement après son entrée en vigueur. Les droits sur le saké et les spiritueux japonais doivent également être supprimés. Le Japon maintiendra les droits d’importation sur cinq catégories de produits politiquement sensibles : le riz, le blé, le bœuf et le porc, les produits laitiers et le sucre.
Espérances
Selon l’étude de l’Institut de recherche économique pour l’ASEAN et l’Asie de l’Est (ERIA), il est démontré qu’après la conclusion de l’Accord PREG, le Cambodge connaîtrait une augmentation de 2 % par an en plus de son PIB courant, de 7,3 % en termes d’exportations et de 23,4 % pour les investissements.
Bien que la signature de cet accord intervienne dans un contexte de forte crise économique en raison de l’épidémie de Covid-19, les membres de l’Association des nations du Sud-est asiatique espèrent beaucoup de cet accord, qui devrait leur permettre de dynamiser à nouveau leur économie en rendant leurs produits moins chers à l’exportation et en facilitant la vie des entreprises via une harmonisation des procédures. Selon Deborah Elms, directrice exécutive de l’Asian Trade Center, une société de conseil basée à Singapour :
« Le Covid-19 a rappelé à la région pourquoi le commerce est important et les gouvernements sont plus désireux que jamais d’avoir une croissance économique positive »
Contexte
Ce pacte commercial est considéré par les « observateurs » comme un moyen pour la Chine d’étendre son influence dans la région après des années de passivité de la part des États-Unis pendant la présidence de Donald Trump. En janvier 2017, ce dernier avait retiré son pays du grand projet concurrent, le Traité de libre-échange trans-pacifique promu par Barack Obama. Effectivement, le PREG est le premier accord de libre-échange entre la Chine, le Japon et la Corée du Sud, trois grandes économies d’Asie. Il se trouve être aussi le premier contrat de libre-échange multilatéral à inclure la Chine.
Avec ou sans l'Inde
Lors de sa signature, quelques analystes ont annoncé que l’accord stimulerait l’économie des pays signataires et tirerait le centre de gravité économique vers l’Asie, et probablement vers la Chine qui pourrait l’utiliser pour accroître son influence.
À rappeler également que l’Inde s’est retirée de l’accord en novembre 2019 en raison de crainte de dumping de produits manufacturés en provenance de Chine et de produits agricoles et laitiers d’Australie et de Nouvelle-Zélande, ce qui affecterait ses propres secteurs industriels et agricoles. C’est aussi une des raisons, le retrait de l’Inde, qui fait craindre que la Chine ne domine le PREG. Les signataires ont toutefois déclaré que l’accord laissait la porte ouverte à l’Inde pour rejoindre le bloc. Bien que d’autres pays ne soient pas autorisés à adhérer au PREG pendant un certain temps après son entrée en vigueur, cette disposition ne s’appliquera pas à l’Inde. Les membres prévoient de rédiger un document distinct permettant à New Delhi de participer à tout moment s’il le souhaite.
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