Première série de réflexions et suggestions livrées à l'issue du récent atelier organisé par la Cambodia Restaurant Association et ses partenaires, sur le thème de l'attractivité du Cambodge : Comment rendre le pays plus séduisant, comment inciter les visiteurs à prolonger leur séjour jusqu'à 7 voir 14 jours contre 3 en moyenne ?
Pour l’atelier réunissant les spécialistes de la gastronomie, c’est Bruno Cardone, doyen de l’Académie des Arts culinaires du Cambodge, qui prenait la parole pour soulever quelques points majeurs et livrer quelques propositions.
Cuisine de rue
« Nous avons eu une discussion approfondie et détaillée au cours de laquelle nous avons soulevé certains points essentiels. Je pense que l’un des principaux points concerne l’identité culturelle et les services de base. Le Cambodge affiche une forte culture de la cuisine de rue et il s’agit d’un aspect social majeur, voire historique. Nous nous sommes penchés sur la manière de mieux gérer la restauration de rue. Et dans ce sens, notre discussion s'est portée sur comment améliorer l’hygiène, la propreté et la sécurité, des éléments cruciaux d’une bonne gestion de la restauration de rue en conservant son coté traditionnel, sans oublier de maintenir un prix abordable pour tout le monde. Ainsi, si la cuisine de rue stimule le tourisme, des améliorations sont à apporter » déclarait M.Cardone.
Guide et communication
Selon le doyen, un guide local de la gastronomie ou de la cuisine en général permettrait de reconnaître, d’améliorer et de promouvoir la gastronomie au Cambodge.
« Nous aimerions créer un guide local spécifique au Royaume dans lequel les différents chefs seraient responsabilisés et susceptible d’exprimer un excellent niveau de qualité qui tiendra bien entendu compte de la cuisine locale », suggérait M. Cardone, ajoutant :
« Il faudrait également réfléchir à la conception d’un itinéraire culinaire. Ce que nous constatons, c’est qu’à l’heure actuelle, il n’y a pas grand-chose à offrir aux touristes dans ce domaine. Beaucoup de visiteurs se rendent au Cambodge et se demandent quel type de cuisine ils pourraient découvrir. Il serait peut-être opportun de proposer aux touristes des expériences gastronomiques purement locales qui incluraient les trois repas de la journée ».
Abordant le sujet du partage des connaissances, M.Cardone proposait de permettre aux chefs de partager leur savoir avec le public sur une base fréquente et régulière. Un concept qu’il juge très efficace concerne les émissions culinaires :
« Avec un public spécifique sur une base fréquente et répétée, les émissions culinaires sont une plateforme de partage d’expériences, de rencontre avec les chefs - cuisiniers et le public. Avec une bonne couverture médiatique, il y a beaucoup d’avantages à tirer de ce type d’émission, au niveau local, mais également international. »
Pour M. Cardone, l'idée est également d'amener le Cambodge sur la scène internationale de la gastronomie. Évoquant une étape obligée, notamment la certification, ce dernier déclarait :
« La certification contribue à la qualité car elle se concentre sur la sécurité alimentaire et sur l'origine des produits. Il s'agit donc d'une question stratégique en termes de qualité. Je pense que les chefs et propriétaires de restaurant d'aujourd'hui s'efforcent de faire passer le message selon lequel les aliments doivent être sûrs et qu'il y a un coût, mais que le client va bien sûr en bénéficier. C'est pourquoi un organisme de certification indépendant pourrait jouer le rôle de médiateur dans le cadre d'une plate-forme officielle de certification de qualité ».
« Il faudrait aussi prendre en compte la saisonnalité des ingrédients. Cela apporte des connaissances non seulement aux habitants, mais aussi aux touristes et au marché international. Il est donc très important que tout ce qui est présenté à l'échelle internationale soit partagé avec les ambassades locales et à tous ceux qui peuvent aider la cuisine locale à bénéficier de publicité. Tous les points que nous avons abordés précédemment consistent donc à travailler en étroite collaboration avec les ambassades et les entités qui peuvent nous aider à diffuser des informations à l'échelle internationale et la liste est longue...», poursuivait-il.
Plat culturel
« Je pense que le client d'aujourd'hui souhaite vivre une expérience globale qui ne se concentre pas uniquement sur la consommation d'un aliment ou d'une boisson parmi d'autres. Nous parlons donc de plats culturels ou typiques du pays. Nous avons fait un tour de table pour essayer de déterminer s'il nous venait à l'esprit un plat cambodgien reconnaissable sur le marché international. Quelques exemples ont été évoqués. Quelqu'un a mentionné le pad thaï. Immédiatement, le pad thaï est associé à la Thaïlande », poursuivait M. Cardone en soulignant :
« Quel serait donc, au niveau international, ce plat facile à reconnaître sur le marché mondial et lié au Cambodge ? »
Donner vie aux régions
Un autre point important soulevé par M. Cardone est de savoir comment donner plus de vie aux régions les plus reculées du Cambodge. « Il faut s'assurer que les touristes découvrent la région des montagnes, celle des lacs et rivières et donc leur cuisine régionale. Nous avons donc pensé à ajouter une liste de liste de visites liées à tout ce qui est écologique, orienté vers les provinces et susceptibles d'offrir des expériences gastronomiques différentes des grandes capitales », disait-il.
Cuisine et Santé
Selon M. Cardone, l'alimentation et la santé vont de pair. Ainsi, les touristes qui partent pour un weekend ou une retraite de 10 jours dans un spa pourraient se voir proposer une expérience gastronomique de grande qualité, pas seulement diététique, mais aussi amusante.
« Alors comment rendre cette expérience excitante ? En utilisant des produits locaux et en essayant de promouvoir les ingrédients du pays », suggérait-il.
Ère numérique
« Pour l’instant, nous n’avons pas de forum intégralement axé sur la gastronomie. Les plateformes ou les discussions sur ce sujet sont donc aujourd’hui isolées. Il n’y a pas de forum au sein duquel toutes les entités seraient conviées à discuter des tendances alimentaires, de tout ce qui est lié à la cuisine en général », poursuivait M. Cardone, précisant :
« Il ne s’agit pas seulement de débattre aujourd’hui autour des nouvelles tendances ou des ingrédients traditionnels, mais aussi en général, par exemple, du lien numérique avec la restauration ou tout ce qui concerne l’élaboration des menus, le calcul des coûts ou tout ce qui a trait à l’approvisionnement en ingrédients. »
Durabilité
Le thème de la durabilité est important et, bien sûr, tout ce que nous essayons de promouvoir ou d’apporter sur le marché doit s’inscrire dans le spectre de la durabilité. Je pense qu’il est évident que les canaux de distribution, la cuisine, la consommation et les produits doivent faire l’objet d’un travail considérable. Tout opérateur du plus petit au plus grand devrait travailler dans ce sens, en prenant soin de s’inscrire dans une démarche constante de durabilité », expliquait M. Cardone.
Plus de concours
Revenant sur la proposition d’une plateforme pour la promotion de la cuisine locale, M. Cardone poursuivait : « Peut-être pourrions-nous aussi organiser un concours avec une récompense numérique telle une campagne de médias sociaux. Nous devons travailler davantage sur ce point », indiquait le doyen, poursuivant :
« Bien sûr, le mois prochain, nous assisterons à des concours culinaires au Cambodge dans le cadre d’une célébration nationale, mais il s’agit bien d’un événement unique, qui n’a lieu qu’une fois par an. Ce que nous suggérons donc, c’est d’en organiser plus souvent, sur différentes plateformes, des concours culinaires qui attireront non seulement les professionnels cambodgiens, mais aussi ceux des pays voisins et du monde entier ».
Slogan identitaire
Si quelqu’un va en Thaïlande, il sera accueilli par le mot Sawadee (Hello). Si quelqu’un visite le Cambodge, la première chose qui lui viendra à l’esprit sera le terme suosdei (Hello). Pour l’instant, il n’existe pas de campagne de promotion pour sensibiliser les touristes à l’aide d’un mot-slogan fort et cela, selon M.Cardone, serait efficace.
Influenceurs
Le monde numérique d’aujourd’hui est dominé par les blogueurs - influencers et et M. Cardone encourage l’organisation d’activités pour encourager les blogueurs à s’impliquer davantage dans sur la scène gastronomique locale.
« Les blogueurs sont la tendance d’aujourd’hui et je pense que nous devons travailler plus dur pour attirer leur attention », ajoutait M. Cardone avant de conclure sur la nécessité d’inviter plus fréquemment des chefs de renommée internationale dans le pays afin qu’ils puissent, « après leur visite, attirer l’attention des médias étrangers sur le Cambodge ».
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