Le lac Tonlé Sap au Cambodge est sans conteste une merveille du monde. Plus grand lac d’eau douce d’Asie du Sud-Est, ses limites s’étendent de 20 kilomètres à 50 kilomètres à l’intérieur des terres et sa profondeur augmente de deux à dix mètres durant la saison des pluies. Le Tonlé Sap est plus qu’un simple plan d’eau ; pour le peuple cambodgien, ce Grand Lac représente un mode de vie. Photographies par Thierry Leclerc.
Le Tonlé Sap est l’un des lacs les plus poissonneux au monde et les dépôts de limon laissés par les inondations annuelles ont créé un terrain extrêmement fertile pour l’agriculture. Il n’est pas surprenant que sur l’un des plus grands lacs d’Asie les civilisations se soient développées et aujourd’hui, une grande partie des moyens de subsistance des Cambodgiens dépend toujours du lac.
Les gens le long du Tonlé Sap sont un peuple heureux et la vie tourne essentiellement au rythme des deux grandes saisons. Lorsque les pluies commencent en mai, le niveau de l’eau commence à augmenter considérablement. Les eaux de crue sortante du bassin versant du Mékong du Tibet au Laos finissent par forcer l’écoulement du Tonlé Sap. Lorsque les forêts environnantes sont inondées, le Tonlé Sap peut s'étendre jusqu'à cinq fois sa taille de saison sèche. La pêche est si productive que plus de poissons sont pêchés ici chaque année que dans tous les lacs et rivières d'Amérique du Nord réunis.
En octobre, avec la diminution des pluies de mousson, les eaux recommencent à couler vers le sud, à travers le Vietnam et la mer de Chine. Les habitants du Grand Lac célèbrent ce phénomène unique au monde avec le traditionnel festival de l’eau ou Bon Om Touk (ព្រះរាជពិធីបុណ្យអ៊ុំទូក)
90 % des habitants des villages flottants sont des pêcheurs et chaque jour, ils se lèvent à 5 heures du matin, comme le faisaient leurs arrière-grands-pères, détachent leurs embarcations motorisées et remontent les affluents quelques kilomètres en amont pour atteindre le Grand Lac à l’aube. Les activités qui commencent très tôt avec la traction d’un filet sur le bateau ne sont que le début d’une longue journée de travail. Les familles, voisins, pères et fils travaillent souvent ensemble pour libérer les poissons du filet après les captures et les vider dans les petites embarcations. Certains jours, une famille de pêcheurs peut capturer jusqu’à 100 kilos de poisson.
Les poissons sont ensuite transportés vers les maisons qui possèdent l’équipement de base de transformation de la pâte de poisson ou prahok. Femmes et les enfants prennent en charge le processus de préparation du poisson, du sel et des ingrédients pour produire cette pâte de poisson très prisée des Cambodgiens.
Ces jours d’abondance compensent les longs mois de la saison sèche alors que les pêcheurs font peu de prises et se tournent parfois vers d’autres activités. Le développement économique très rapide du pays a aussi sensiblement affecté l’activité sur le lac et ses zones de pêche.
Si la pêche représente la partie centrale de la vie le long du Tonlé Sap, le Grand Lac est bien plus qu’une zone de pêche abondante. Le fleuve est surtout le cœur battant du Cambodge et symbolise aussi un peuple qui gagne sa vie avec la richesse de sa terre et les fruits de son dur labeur. Le Grand Lac est sans conteste une merveille écologique du monde et l’on souhaite qu’il puisse nourrir le peuple cambodgien pendant encore de longues années.
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