Don Virao sera à l'affiche de la prochaine exposition intitulée « Eternal » qui débutera le 15 janvier 2021 dans la galerie Sra'Art de Phnom Penh. Pour cette exposition, il sera accompagnée de la photographe cambodgienne Tyta Buth et du designer français Jean-Baptiste Carraro.
L’art a toujours eu pour vocation d’apporter un angle de vue original afin de mieux comprendre notre environnement. Douglas Victor aka DonVirao déclare qu'il souhaite « partager sa vision du spectre de l’univers à travers ses toiles ». Cambodge Mag a rencontré le jeune talent lors de sa précédente exposition : Dark Matter. Entretien :
CM : Pour les lecteurs qui ne vous connaissent pas encore, pouvez-vous nous présenter DonVirao ?
C’est l’alter ego que j’emploie pour œuvrer, faire des expositions. Un acronyme de tous mes prénoms que j’utilise depuis que j’ai voulu me lancer réellement en tant que peintre professionnel.
CM : D’où vient cet engouement pour la peinture ?
C’est venu assez naturellement, je dessine et peins depuis mon enfance. À l’école, je ne faisais que ça et lorsque je suis arrivé au Cambodge, cette passion s’est amplifiée.
«La peinture était un moyen pour moi de m’évader, d’exprimer des pensées que je n’arrivais pas à exprimer autrement »
J’ai voulu en faire mon métier même si ce n’était pas facile. J’ai toujours été attiré par la musique, la peinture, la sculpture, sans oublier le cinéma : j’ai commencé quand j’avais 10/11 ans à utiliser la caméra de mon beau-père afin de tourner des séquences expérimentales. Mais je suis revenu assez rapidement sur la peinture, car elle est pour moi beaucoup plus spontanée. Il n’y a aucun intermédiaire entre le véhicule et la matière, le contact est direct, pour moi la peinture est vraiment authentique et primitive, je suis très sensible à ce médium, à son magnétisme.
CM : Quelles sont vos sources d’inspirations, les peintres que vous admirez, que vous voudriez faire découvrir ?
C’est plutôt un grand ensemble de ressources culturelles et d’expériences qui m’inspire généralement, mais principalement l’observation de la nature et du cosmos. Je citerai quand même Alex Grey, un artiste peintre qui fait des représentations visionnaires dont l’œuvre est très symbolique. Ma Luiming, un artiste contemporain chinois, connu pour son exploration du pouvoir, de la poésie. Et enfin Pablo Amaringo, un artiste péruvien qui nous propose des visions de la jungle, de la nature en y associant une dimension psychédélique.
CM : Comment voyez-vous l’art contemporain au Cambodge ?
Il existe de très bonnes bases pour une scène artistique pointue qui se différencie du reste de l’Asie du Sud Est, voire même du Monde.
« Tout un univers est à créer ici, les sources d’inspirations sont infinies, la flore est magnifique, les temples…»
L’imaginaire peut facilement prospérer dans le royaume.
CM : Vous avez présenté votre dernier travail intitulé Dark Mater il y a quelques mois Phnom Penh, pouvez-vous nous en dire quelques mots ?
C’était une exposition qui parlait de la matière noire. C’est un sujet très récent auprès de nos confrères scientifiques qui œuvre afin de comprendre d’où elle vient, si elle était présente avant la matière. Il y aurait 28 % de matières noires dans l’univers, approximativement un tiers associé avec de la matière sans oublier l’énergie sombre qui serait présente à 67 %. Ce sont des explorations personnelles liées avec ce concept d’antimatière, ou les tableaux sont très sombres
CM : C’était votre 3e exposition au Cambodge, quel regard portez-vous sur vos précédents travaux ?
Ma dernière exposition, Spectrum of the Multiverse, traitait de la « multidimensionnalité » de l’univers. J’essaie de garder ce fil conducteur, une histoire qui amènera à la prochaine exposition en abordant des sujets différents qui sont en lien les uns avec les autres. J’évite de trop regarder en arrière, je pense que ce qui est fait n’existe plus vraiment.
Je suis toujours en état de recherches perpétuelles, de nouveaux sujets, nouvelles techniques pour élaborer des œuvres qui n’ont rien avoir avec les précédentes. Je ne veux surtout pas me borner aux mêmes sujets, je préfère aller puiser dans de nouvelles techniques, alterner les styles, les additionner à mon expérience passée tout en créant quelque chose d’unique.
CM : Vous parlez de nouvelles techniques et médiums, quels sont ceux que vous souhaitez explorer actuellement ?
J’aimerai effectuer des tests avec le cuivre, le feu ainsi que des polymères synthétiques pour arriver à des effets qu’on ne retrouve nulle part ailleurs dans la nature, possible uniquement par l’intervention humaine.
« Tout ce qui est de l’ordre du chimique m’intéresse beaucoup, réussir à faire de l’art avec des procédés comme la rouille ou l’oxydation. »
J’aimerais aussi créer des peintures qui soient plus représentatives de la sculpture, mais à la fois « disposables » sur un mur.
CM : Quels sont vos projets pour l’avenir ?
Travailler davantage, produire plus d’œuvres que je n’aurai jamais envisagé avant ; par manque d’expériences et de moyens, contribuer à développer encore la scène artistique de Phnom Penh, car il y a énormément de potentiel ici. Je travaille actuellement sur ma prochaine exposition, et sur un projet d’ateliers de peinture figurative à l’huile.
CM : Pourquoi spécifiquement l’huile figurative ?
Parce que c’est la base. On a commencé à peindre dans des grottes, puis petit à petit, après la découverte des pigments l’homme a trouvé un moyen de les lier : l’huile. C’est ce qu’on utilise depuis la nuit des temps pour représenter ce qui nous entoure. L’acrylique existe depuis peu et a troublé pas mal de choses selon moi. Certes, sa création a ouvert beaucoup de portes, mais cela a aussi occulté les racines de la peinture, ses bases, et ses fondations.
Pour avoir une bonne compréhension de notre métier je pense qu’il faut apprendre la technique de la peinture a l’huile, faire des études de maître reste très important. Si on veut peindre des choses abouties et personnelles il est primordial de maîtriser le réel avant d’explorer des peintures qui sont plus créatives.
CM : Quels conseils donneriez-vous à un jeune artiste qui veut se lancer ?
Il n’y a que vous qui puissiez faire ce que personne d’autre ne sait faire. Pour un jeune artiste, gardez votre nom et votre travail propre puis créez sans limites, sans compromis et sans stigmates.
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Propos recueillis par Michael Grao. Photographies : TYTAART et Christophe Gargiulo
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