La jeune chef franco-cambodgienne Sarika Sor parle de ses souvenirs de famille, de l’expérience Top Chef, de ses projets et d’un voyage très attendu au pays de ses ancêtres.
« J’ai eu le livre quand je me préparais pour Top Chef (concours France, 14e édition, mars-juin 2023) », explique Sarika Sor, née en1994 à Compiègne, France.
« Depuis, ça a été des mois mouvementés, mais je l’ai montré à mes parents, et j’ai exploré quelques recettes », dit-elle.
Le livre s’intitule L’art culinaire du Cambodge, et l’héritage qu’il porte représente beaucoup pour Sarika et ses parents, tous deux originaires de Battambang, mais qui se sont rencontrés et mariés en exil dans les années 1970, après avoir échappé aux Khmers rouges.
Participer à Top Chef et atteindre les quarts de finale a été une expérience qui a changé la vie de cette brillante étudiante - BA à Montréal, MA en marketing à l’Université de Lille - qui a vécu « des moments difficiles, mais tellement enrichissants ».
« Alors que je me débattais avec moi-même, seul cheffe amatrice face à des chefs et sous-chefs expérimentés (parmi les 16 candidats de l’édition 2023 de la célèbre émission de télévision sur M6 figuraient des professionnels tels qu’Alexandre Marchon, Victor Blanchet, Bérangère Fagart, Carla Ferrari, Danny Khezzar, Jacques et Mathieu Lagarde, et Hugo Riboulet, qui a remporté le concours ), j’ai progressivement pris confiance en moi et, ce faisant, j’ai mieux compris mon héritage culinaire, qui est essentiellement cambodgien. », confie-t-elle, ajoutant :
« J’ai compris que, comme dans la plupart des familles de la diaspora, mes parents étaient assez stricts, exigeant l’excellence de leurs enfants, et que leur principale façon d’exprimer leur amour était de cuisiner de bons plats chaque fois que nous étions tous à la maison. »
Depuis qu’elle a remporté le concours de sélection Objectif Top Chef et qu’elle a été l’une des candidates les plus appréciées par les chefs jurés 3 étoiles invités, la cuisine cambodgienne a été très présente dans l’esprit de Sarika : des créations telles que la tarte au citron « Phnom Penh -Menton », ou une nouvelle version du poulet cher à sa mère - elle a utilisé de la viande de pigeon à la place - avec du gingembre, ou encore sa version de la traditionnelle soupe aigre-douce (samlor phaem ning chour) en témoignent de façon mémorable.
Sarika continue d’utiliser des ingrédients cambodgiens et son ADN culinaire khmer dans sa vision personnelle de la gastronomie française :
« Il est très stimulant de travailler pendant quelques mois dans une nouvelle cuisine, de se débrouiller avec ce que l’on a sous la main pour s’exprimer. En tant que chef résident dans un restaurant du 17e arrondissement de Paris, j’ai par exemple décidé de ne mettre qu’un seul plat de viande à la carte, la langue de veau, bouillie comme dans tant de cafétérias d’écoles françaises - où ce plat a souvent laissé de mauvais souvenirs ! Mais dans un bouillon riche, puis saisie au barbecue et servie avec une sauce épicée d’Asie du Sud-Est, cette langue devient un délice »,raconte-t-elle, poursuivant :
« Dans un restaurant à Lacanau , je n’avais qu’un four à pizza et j’y ai tout cuit, y compris des petits pains bao, fascinant ! Ou encore lors d’un festival gastronomique à Bruxelles cet été, où j’ai préparé le poulet au gingembre de ma mère en croquettes, des brochettes au kreung, des gyozas au boudin…».
« Actuellement, je suis chef invitée dans un restaurant de tapas haut de gamme à Paris, et j’ai revisité le ragoût de curry rouge et d’ananas avec des gésiers de volaille à la place de la viande de porc. »
De retour à Lille lorsque son travail le lui permet, elle aime parcourir la ville à vélo, offrir à ses amis de délicieux repas (avec des crevettes et des poissons séchés du Cambodge en guise d’amuse-bouche), rendre visite à ses amis (souvent étoilés au guide Michelin) dans le nord de la France.
Et, elle envisage sérieusement de s’envoler vers le pays de ses ancêtres : « J’étais tellement occupée par mes études, puis par ce saut dans la cuisine professionnelle, que je n’en ai jamais eu l’occasion. Lorsque j’étais “enfermée” dans le studio de Top Chef, l’un de mes frères [elle a quatre frères et sœurs] s’est marié au Cambodge, toute la famille s’y est rendue et s’est embarquée dans un road trip d’un mois à travers le Royaume, j’étais tellement triste de ne pas pouvoir me joindre à eux. Mais j’ai une invitation en attente d’une ferme de poivre et d’un centre de villégiature de Kampot, je serai bientôt là ! »
Bernard Cohen & l’équipe de Living Cambodia
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