À Paris cette semaine, 10 artistes peintres d’Asie et notamment cinq du Cambodge, Kim Leng Ung (Beaux arts de Paris), Heng Ravuth, Emmanuelle Nhean, le célèbre Stef et la jeune Fia, seront à l'honneur.
Les œuvres de ces artistes côtoieront celles d’artistes thaïlandais, japonais, malaisien et taïwanais autour de la thématique de la couleur bleue. L'exposition débutera jeudi 19 décembre 2024 à la Galerie OIA (Espace Oxone, 8 rue Chapon, Paris 75003 - vernissage de 17 à 21h).
Ce n'est pas la première fois que cette galerie accueille des artistes du Royaume, parmi les autres artistes Cambodgiens que la Galerie Oia a présenté depuis sa création, citons Nou Sary, Dina Thun, Karona, Kosal Long, Din, Hom Rith, Seyha Hour, Changkrim Mil, Morn Chear, Chhim Sothy, Channy Choeun, Ponleu Prom, Van Chhovorn ou encore Ramya Chuon
« En 2024, j’ai eu le plaisir de présenter plusieurs expositions : "Chaul Tchnam Thmey'' à l’occasion du nouvel an Cambodgien, puis une conversation en deux temps avec la galerie Arts d’Australie Stéphane Jacob, autour de la rencontre entre l’art aborigène et l’art d’Asie du Sud-Est avec“Racines” (16 mai - 15 juin) et “Strong” (6 juillet - 5 octobre). », explique Hervé Cadet, directeur de la Galerie OIA, précisant :
« Pour cette nouvelle exposition, j’ai fait appel à dix artistes de cinq pays d’Asie du Sud-Est. Des artistes confirmés et d'autres émergents, du Cambodge, de Thaïlande, de Malaisie, de Taïwan et du Japon, qui ont partagé pour ce projet leur rapport au bleu, les sentiments et les émotions que leur évoque la couleur bleue. »
« L’indigo, le bleu marine et l’outremer, le bleu ciel, le céladon, le turquoise, le cyan, le cobalt... La couleur de la mer, du ciel et de la nuit, des nuances, des perceptions, des significations qui varient à travers le monde. En Occident, le bleu évoque souvent la tranquillité, la fidélité, la foi ou encore la mélancolie. En Asie, il est un miroir de l’âme, un symbole de sagesse, de sérénité, de spiritualité, mais aussi la couleur de la jeunesse ou de l’immortalité...À travers les œuvres et le regard de ces artistes, l’exposition “Bleu” explore ces multiples nuances ».
Les artistes
SU Mei-Yu
Née à Taïwan, SU Mei-Yu est une artiste peintre formée aux Beaux-Arts de Taïwan et de Paris. Elle a exposé en France à Taiwan et au Japon. Docteure en Histoire de l’Art, Professeure d’Université à Taiwan, elle est également une commissaire d’exposition spécialiste de Matisse et de culture chinoise traditionnelle, Elle a organisé des expositions marquantes, notamment "L’Age d’or de l’impressionnisme" et "Matisse et La Chine", qui lui valurent d'être décorée Chevalier dans l'ordre des arts et des lettres en 1998.
Ses œuvres sont présentes dans les collections de : École des Beaux-Arts de Paris
Musée des Beaux-Arts de Taipei, Taïwan Musée des Beaux-Arts de Kaohsiung, Taïwan
SU Mei - Yu dit vouloir peindre « la mémoire des nuages sur l’eau », autrement dit peindre l’empreinte immatérielle, labile et mouvante, qui accompagne notre regard du haut vers le bas, du ciel vers la terre en se laissant glisser dans la fluidité des lames de couleurs noyées d’eau et de pigments.
Elle refuse le pinceau et préfère poser sa pâte colorée avec des outils qu’elle s’invente. Son souci majeur étant de laisser trace, de transposer sur la toile une sensation visuelle et tactile, elle cherche le tiers qui, entre ses mains, opère ce transfert indicible, ce passage du réel au symbolique, la métamorphose de la banalité en témoignage sensible. Elle cueille toutes sortes de feuilles - philodendron, rhubarbe, palmier, aussi bien que le paliurus hemsleyanus - recueille objets insolites ou rebuts trouvés au sol ou dans un magasin de bricolage par Kim, son mari et compagnon en peinture.
Ces «objets », la plupart du temps destinés à d’autres usages, offrent la possibilité à SU Mei-Yu de transgresser leur forme initiale dont elle ne conserve que la trace la plus minimale. Ils sont des intercesseurs entre l’artiste et la peinture qui occupe la première place. L’outil se prête aux gestes de SU Mei-Yu mais c’est la peinture, au bout du compte, qui aura le dernier mot.
Quand SU Mei-Yu se met au travail, s’engage, en effet, entre elle et son support une sorte de jeu de rôle où chacun attend de l’autre une surprise, un défi. Les grattoirs, griffes ou couteaux à peindre se mêlent, se nouent au dépôt végétal. SU Mei-Yu discrète, cherche une sorte d’anonymat du geste en laissant interagir, presque à son insu, l’outil et le médium. Elle se fait légère, s’absente presque.
L’empreinte est cependant reconnaissable. Elle renvoie à une connaissance, à ce que l’œil sait de l’objet ou de la feuille, mais l’artiste cherche à la décharger le plus possible de sa substance réaliste. Le geste est vif, furtif. Il place et laisse glisser la couleur qui se superpose à celle des dessous. Il dépose des signes, les effluves d’un savoir mais n’affirme jamais une figuration trop lisible. (Agnès Fabre, Autrice).
Kim-Leng Ung
Kim-Leng Ung est un peintre cambodgien né en 1958. Après avoir fui le Cambodge à l’arrivée des Khmers Rouges, il arrive en France à 17 ans et étudie aux Beaux Arts de Paris.
Sa peinture reflète les traumatismes de l'exil et du génocide cambodgien, il évoque la perte, l'absence et la mémoire enfouie, tout en cherchant l'espoir dans des instants suspendus, comme ceux de l'intime et du désir. Ses œuvres sont présentes dans les collections de Musée des Beaux-Arts de Taipei, Taïwan Musée des Beaux-Arts de Kaohsiung, Taïwan.
« Je m’exprime à travers le bleu : bien qu’il soit une couleur primaire, il représente pour moi quelque chose de mystérieux et de profond.
C’est également une couleur masculine que j’utilise dans mes tableaux comme une forme d’expression à la fois picturale et sentimentale. »
Heng Ravuth
Heng Ravuth est un artiste Cambodgien né en 1985, diplômé de l’Université Royale des Beaux Arts de Phnom Penh.
Le parcours artistique de Heng Ravuth est marqué par le rôle initial qu’a joué la photographie dans son exploration du langage corporel. C’est ensuite avec la peinture qu’il poursuit sa quête esthétique et intérieure, explorant sa propre personnalité et ses interactions avec le monde qui l’entoure.
À travers les représentations de son corps mis à nu, Heng se livre avec sincérité, révélant une double vulnérabilité : vis-à-vis des regards extérieurs mais aussi de ses émotions profondes.
« Le bleu est une couleur qui me calme, me relaxe. Le bleu est associé à quelque chose de doux pour moi, à la paix. Et c’est comme si le bleu me transportait dans un autre endroit, comme s’il prenait le relai de mon imagination »
Nobuko Murakami
Nobuko Murakami est une artiste plasticienne japonaise, installée en France depuis 1997. Elle explore le rapport entre le visible et l’invisible, se nourrissant des croyances et traditions qui l’ont accompagnée depuis l’enfance.
Nobuko étudie et approfondit toutes les possibilités qu’offre le papier, depuis la technique traditionnelle de l’Origami, réinterprétée pour créer des sculptures, masques et installations in situ, jusqu’à l’écriture braille qui relie le visible à l’invisible. Elle présente, dans cette exposition une sculpture en papier ainsi qu’un large éventail de son travail en cyanotype, qui laisse à la lumière le soin de révéler ses créations.
« Le cyanotype est une manière d'expérimenter et d'interagir avec la nature, comme une forme d'alchimie, ça joue entre le soleil, la composition du fer et du sel. Nous avons aussi dans notre corps ces minéraux indispensables.»
«La raison pour laquelle nous cherchons le soleil est peut-être parce que nous voulons graver un rêve bleu (la poésie) dans notre corps.»
Stef
Stéphane Delaprée, alias Stef, est un artiste plasticien français. D’abord dessinateur, il se consacre à la peinture à partir de 1992, développant le style “Happy Painting”, centré sur la simplicité et les couleurs vives.
Arrivé au Cambodge en 1994, il y poursuit depuis sa quête du bonheur, développant son approche d’« Happy Painting » et représentant des scènes de la vie quotidienne au Cambodge.
Collections: Musée des Arts d'Ahuja, Calcutta, Inde
Emmanuelle Nhean
Emmanuelle Nhean est une peintre Cambodgienne résidant en France depuis 1980. Conjuguant la tradition picturale tirée du Reamker (le poème épique Khmer adapté du Ramayana) à la peinture moderne et contemporaine occidentale, elle navigue entre la figuration, l’abstraction et l’art Khmer.
Les œuvres d’Emmanuelle Nhean paraissent tantôt fouiller la mémoire du monde, tantôt la sienne, mettant au jour les rêves de son enfance ou les mythes les plus anciens.
Sakon Malee
Sakon Malee est un artiste originaire de la région d'Isan, au Nord-Est de la Thaïlande, une terre de culture bouddhiste riche en traditions.
Son travail s'inspire des fresques bouddhistes distinctives de cette région, où l'art et la spiritualité se rencontrent dans des compositions mêlant scènes de la vie quotidienne, paysages pittoresques et figures religieuses.
Faizal Yunus
Faizal Yunus est un peintre, graveur et sculpteur malaisien. Très sensible aux questions environnementales, il évoque - grâce à sa maitrise des contrastes, de la profondeur et des perspectives - le souvenir des paysages et des reliefs de son passé. Prix : MEAA 2019 (Malaysian Emerging Artist Award).
Dibsanist
Dibsanist célèbre la nature à travers des œuvres minimalistes et délicates, reproduisant des formes organiques porteuses de sens, de souvenirs ou de traditions.
Inspirée par la médecine traditionnelle, mais aussi par la faune et la flore sous-marine, elle modèle - autant qu’elle les peint - des feuilles, coraux, gorgones, algues ou oursins qu’elle fixe ensuite à quelques millimètres au dessus de la toile, créant des jeux d’ombres et racontant bien davantage que l’histoire de ce monde silencieux.
Fia
Fia est une jeune artiste visuelle Cambodgienne, qui canalise sa créativité dans des performances, des peintures et des techniques mixtes pour s’attaquer aux problèmes de société, en se concentrant particulièrement sur l’autonomisation des femmes.
À propos
« Après une carrière au Ministère des Affaires Étrangères puis au Parlement au service de l'île de La Réunion, le besoin de revenir à ce qui me passionnait profondément, l’art est devenu une nécessité. Mes voyages à travers l’Asie, l’Amérique du Nord, l’Europe, l’Océan Indien et mon expatriation en Australie m'ont permis découvrir des cultures fascinantes mais aussi, de rencontrer de nombreux artistes et de m’enrichir sur le plan humain et sur le plan spirituel ».
« Après m’être formé auprès de Stéphane Jacob-Langevin, spécialiste de l’art aborigène, j'ai créé en 2023 la galerie Oia. J’ai pensé la Galerie Oia comme répondant à mes aspirations : ouverte sur tout l’Orient, s’intéressant aussi bien aux mythologies les plus anciennes qu’aux expressions les plus contemporaines. Un lieu singulier et nomade, dédié à la création contemporaine de l’immense continent asiatique ».
Hervé Cadet - Directeur de la Galerie OIA
Tél. 06 87 88 70 27
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