Au deuxième jour du Forum d'Affaires France Cambodge, l’événement a débuté avec la prise de parole de l’Ambassadeur de France au Cambodge, Son Excellence Jacques Pellet, qui s'est déclaré réjoui de l'organisation de ce Forum.
Des sujets divers qui ont invité l’Ambassadeur à affirmer la valeur ajoutée du Cambodge comme pays actif dans la région mais également, certaines difficultés : « Il faut regarder les limites de notre présence et les difficultés que nous pouvons avoir ».
En effet, selon lui : « Nous sommes dans un environnement concurrentiel, il n’y a pas de prix pour la France. Le Cambodge a toujours réussi à avoir un large spectre de partenariats et arrive à se positionner par sa géostratégie comme partenaire de nombreux pays. »
Ce discours d'ouverture était ensuite relayé par Monsieur Roux de Bézieux, Président de l’Alliance des Patronats Français (APF) et Président d’honneur du MEDEF, venu tout droit de France pour cette occasion. Ce dernier a notamment pu rencontrer les autorités cambodgiennes avec lesquelles « les échanges ont été très fructueux ».
« J'ai rencontré des personnes très “pro business” et à l'écoute. J’ai été frappée par la facilité d'accès assez peu commune, pourtant, j’ai visité beaucoup de pays. Mais là, au Cambodge, c’est une très bonne nouvelle d’avoir des hommes politiques à l'écoute des entrepreneurs. »
Une volonté de coopérer et de renforcer les liens entre la France et le Cambodge notamment en perception du 20e Sommet de la Francophonie en 2026 qui pourrait avoir lieu dans le Royaume.
L’environnement économique et juridique au Cambodge et ses perspectives
Deux thématiques majeures pour les futurs investisseurs au Cambodge que Monsieur Ly-Batallan, Chef du service économique et Conseiller économique de l’Ambassade de France au Cambodge et Monsieur Thierry Gougy, Senior Partner à DFDL Cambodge, ont abordé.
Davantage sous un angle structurel que conjoncturel, Monsieur Ly Batallan a partagé les différentes marges d’avenir pour le Royaume au regard des différents secteurs de l’économie cambodgienne, mais également, les différents types d’investissements.
Il déclarait notamment : « Un décollage des investissements privés énorme qui correspond bien à la politique gouvernementale de s’appuyer sur le secteur privé pour financer de projets structurant l’économie. Mais, cela arrivera à connaître une limite. »
Ce dernier ajoutait également un point important de l’économie, celui du domaine du tourisme : « Le tourisme, point important dans l’économie : on voit que depuis la crise, le tourisme reprend, mais lentement et différemment. Sur les cinq premiers mois de l’année, nous avons plus de 22 % d’arrivées internationales pour les trois aéroports et, sur Angkor, la vente des billets a progressé de 37 % durant les cinq premiers mois de l’année. »
« Ce que j’aimerais mettre en valeur, c’est que le marché cambodgien a de réelles perspectives. Ici, nous avons à la fois une stabilité et un développement qui permet de faire des affaires. Vous avez les savoir-faire, venez. Vous avez les capacités d’investissement, venez », concluait-il, en précisant de bien prendre toutes les spécificités du pays en compte.
Par la suite, le climat général des affaires, la loi sur les investissements ou encore la pratique administrative et fiscale ont été développés par Monsieur Thierry Gougy.
En effet, le Cambodge a une politique d’ouverture économique et un climat favorable aux investisseurs étrangers qui bénéficient des mêmes conditions que les investisseurs cambodgiens, à l’exception de très rares restrictions comme : le principe de non-discrimination incluant des mesures de réparation économique en cas de pertes d’investissement, l’interdiction de nationalisation des investissements étrangers, la libre fixation des prix, le libre transfert des fonds et convertibilité des devises et la création de zones économiques spéciales (ZES).
Et comme il l’affirmait : « 2030 c’est demain. Les industries exportatrices ici, au Cambodge, doivent commencer à s’armer afin de faire face à ces demandes de renseignements et de “reporting” de la part de l’Union européenne, car le coût de l’exportation des produits divers de la zone qui vous concerne risque de grimper de façon assez significative ».
Les questions des financements publics et privés au Cambodge
Thématique développée par Madame Sandrine Boucher, Directrice Régionale de l’Agence Française de Développement (AFD) (Cambodge) et Monsieur Nicolas Hollanders, Directeur Général de BRED Bank Cambodia.
Du côté de l’AFD, sa présence se justifie par l’accompagnement de l’équipe France dans le renforcement des liens entre la France et le Cambodge, mais également, par son expertise française apportée notamment dans le secteur du développement durable.
Avec une répartition sectorielle du portefeuille d’activité qui s’illustre avec 47 % en eau et assainissement, 31 % dans le développement durable, 14 % dans le domaine de l’énergie, 7 % en faveur de la formation professionnelle et 1 % pour d’autres secteurs. Les bailleurs de fonds sont constitués eux, majoritairement de bailleurs multilatéraux qui représentent 58 % des financements dans les investissements publics en 2021. Sandrine Bouchet confiait :
« Nous sommes sur une dynamique des bailleurs de fonds qui évolue. »
Elle ajoutait : « Au-delà de cela, l’AFD travaille en partenariat avec les autres bailleurs de fonds notamment avec la délégation de l’Union européenne, car elle permet d’avoir accès à des subventions qui peuvent être utiles pour compléter des financements en prêts que nous accordons pour faire des accompagnements sur des projets, de l’assistance technique ou encore de la formation. De plus, l’AFD collabore également avec la Banque Asiatique de Développement qui permet d’intervenir dans le secteur de la formation professionnelle. »
« Dans un contexte très favorable de consolidation des relations entre la France et le Royaume, la volumétrie de l’AFD au Cambodge accompagne donc cette dynamique positive qui intéresse les acteurs français. 80 % du portefeuille a impliqué un acteur français privé. En termes de marché sur la période 2019 – 2023, il y a eu 200 millions d’euros qui ont fait l’objet d’un appel d’offres international et 86 % de ces marchés ont été remportés par une entreprise française », concluait Sandrine Boucher.
Enfin, selon Nicolas Hollanders : « C’est un marché dynamique, mais aussi concurrentiel. Dans le secteur bancaire, il y a plus de 58 banques commerciales sur le territoire cambodgien, ce qui montre l’intérêt porté au Royaume. »
Les tables rondes, entre opportunités et difficultés à surmonter
Table ronde sur le tourisme
Secteur essentiel pour l’économie du pays, c’est aux côtés de Monsieur Charles-Henri Chevet, Directeur général du Sofitel Phnom Penh Phokeethra (modérateur), Monsieur Jacques Guichandut, Directeur général de All Dreams et de Monsieur Vichit Ith, PDG du Cambodia Tourism Board, que le débat a eu lieu.
Avec actuellement une reprise modérée suite à une croissance en 2019 et à de lourdes conséquences durant la période de la crise sanitaire, le Royaume demeure tout de même au sein de certains classements touristiques dans les « Tops Pays » (gastronomie, monument…).
Le Royaume attire par son authenticité, son histoire, ses traditions ou encore sa communauté. Une qualité notamment mise en avant par Jacques Guichandut qui a présenté la campagne lancée en janvier, « Destination Cambodge 2024 », afin de pouvoir attirer plus de visiteurs de France et d’Europe :
« Le Cambodge n’est pas vu comme une destination, mais comme une extension », expliquait-il.
Une campagne qui reflète donc une notion fondamentale du secteur du tourisme qui est celle de l’image. Élément clé qui change la perception des touristes du pays. En effet, avant de visiter le Cambodge, les personnes extérieures résumaient le Royaume aux temples d’Angkor, à l’histoire et aux Khmers rouges. Alors qu’après s’être rendu au Cambodge et l’avoir quitté, il en ressort le mode de vie, la communauté khmère, l’image positive du pays et sa sécurité.
Une image qu’il espère donc développer notamment avec le prochain Sommet de la Francophonie en 2026 au Cambodge qui permettrait de relancer l’attrait de la destination.
De son côté, Monsieur Vichit Ith a développé le cas du Cambodge au regard de son positionnement concurrentiel. Une situation qui révèle le Royaume comme un pays en retrait par rapport à ses concurrents comme la Thaïlande et Singapour.
Selon lui : « Le Cambodge possède des atouts substantiels à développer et à promouvoir. »
Une profonde volonté d’évolution notamment rendu possible avec le travail du Cambodia Tourism Board (CTB) où comme l’expliquait Monsieur Vichit Ith : « Le CTB sera la principale institution chargée de promouvoir l’industrie touristique, travaillant de concert avec tous les opérateurs privés, le ministère du Tourisme et les ministères concernés. »
Table ronde sur la construction
Débat animé par des professionnels et responsables de grands projets au Cambodge. Nous retrouvions, Michel Cassagnes (modérateur), Directeur général de Archetype, Serge Pak, Directeur général de Béton Block and Pave, Amine Alain Guillot, Directeur de Projet à VINCI Construction Grands Projets et Stéphane Bigorre, Directeur général de LBL International.
En 2019, il y avait autour de 4 000 permis par an pour une valeur totale de 11 milliards USD, une hausse de 35 % par rapport à 2018. Après avoir passé les années compliquées entre 2020 et 2022 à cause de la crise sanitaire, un retour à la hausse s’est réaffirmé en 2023 avec 5,5 milliards USD. Pour cette année, au regard du premier trimestre de 2024, 830 permis ont été délivrés pour un investissement de 790 millions USD.
Un secteur qui demande beaucoup de main d’œuvre et qui soulève la question des ressources humaines : « Pour surmonter le problème des ressources humaines, nous sommes favorables à un système similaire à la taxe d’apprentissage. Nous réalisons déjà un partage d’expérience avec des formations auprès de nos employés, mais également, en organisant, par exemple, des visites au sein de nos sites aux étudiants », comme l’expliquait notamment Monsieur Serge Park aux côtés des autres panélistes.
Table ronde sur les transports
Enfin, une table ronde modérée par Monsieur Cyril Girot, PDG de Cambodia Airports et accompagné de Margaux Dusart, Directrice nationale de CMA-CGM et de Vissoth Nam, PDG de Air Asia Cambodge. Cette discussion a mené aux sujets portant sur l’infrastructure terrestre, maritime et aérienne, notamment au regard de la localisation du Cambodge en tant que pays au carrefour notamment du Laos, du Vietnam et de la Thaïlande.
Dans le secteur maritime, le Groupe CMA CGM, leader dans le transport de conteneurs, est numéro 3 mondial avec plus de 400 agences dans le monde, 155 000 employés, une flotte de 620 navires et représente plus de 277 services relaient les continents. Présent depuis 12 ans au Cambodge avec trois services directs notamment sur Singapour, la Malaisie, le Vietnam et depuis, la Chine.
Selon Margaux Dusart : « Depuis 2024 jusqu’à mai, nous avons observé une augmentation de l’export en valeur, le pays est en croissance et, est ouvert aux investissements privés : la Chine étant le pays majoritaire d’investissement à hauteur de 67 % en 2023. »
« Le Cambodge a la volonté de diversifier ses partenaires et ses produits d’exportation, majoritaire le textile et il essaie de se développer sur l’électronique, l’agriculture et l’automobile. »
Elle ajoutait : « Aujourd’hui, au Cambodge, le challenge actuel de l’industrie maritime est celui des produits digitaux. Il n’y a pas vraiment d’écosystème entre les parties logistiques puisqu’elles ne sont pas connectées aux systèmes d’informations terminaux. Cela empêche un “tracking” en temps réel qui est beaucoup demandé par les entreprises. Et, il y a également des problèmes sur la profondeur du Mékong pendant la saison sèche. »
Du côté de l’infrastructure aérienne, Air Asia Cambodge se révèle comme la compagnie « low-cost » qui voit très grand et loin notamment au regard de leur taux de croissance annuel de 10 millions de passagers par an de 200 nationalités différentes.
Néanmoins, le challenge majeur porteur d’ombre à leur développement est celui de l’attente des voyageurs et de la reprise du tourisme.
Au-delà de cela, Vissoth Nam demeure très positif : « Nous sommes très fiers de nos résultats et de l’expérience que nous offrons. Nous avons vu des familles qui n’avaient jamais voyagé et qui montaient dans un avion pour la première fois. C’est très significatif. »
Une deuxième journée de ce Forum d’Affaires France Cambodge 2024 qui a fortement éclairci les axes de réflexions, dans divers secteurs, des investisseurs étrangers. Des échanges avec les professionnels locaux qui n’ont donc fait qu’accroître les intérêts de ces investisseurs à rejoindre le Royaume afin d’y développer leurs activités.
Comments