Chers lecteurs(trices). Me revoici avec ma série de portraits de Khmers atypiques autour du monde avec, cette semaine, le co-scénariste du film qui fait actuellement fureur dans nos cinémas français - Les Rascals - et également réalisateur du making off : le Cambodgien Virak Thun.
Retour aujourd’hui sur le parcours peu commun de ce khmer arrivé enfant en France après avoir fui notre royaume avec sa famille.
Entretien
Toi en quelques mots
Je m’appelle Virak Thun, je suis né dans un camp de réfugiés (Surin) et je demeure en région parisienne.
Ton enfance est atypique. Suite à votre exode des camps de réfugiés de Thaïlande, tu te retrouves en Alsace jusquà tes 8 ans…et tu en absorbes la culture régionale ainsi que son mode de vie. Quels en sont tes souvenirs les plus marquants ?
La situation exceptionnelle de par la position de notre village (Dieffenthal) au pied d’une montagne, sa culture identitaire marquée, mais surtout un esprit de Noël omniprésent et marqué par une bienveillance constante.
Par la suite, votre installation en région parisienne va marquer un changement radical dans ta vie. Comment feras-tu, de ton point de vue, ta place en tant que Khmer au milieu de cette population totalement différente de ton petit nid douillet alsacien ?
Tout d’abord frappé par ce brassage multiculturel, je suis submergé par ce mélange de races que je définirais de magique. De ce fait, ma culture khmère fut pour la maison et en dehors, j'étais un vrai Français « Alsacien ».
L’influence de ton père, sa réserve, sa pudeur quant à votre histoire et son personnage dans l’ensemble ont exercé une forte influence sur ton comportement. Quelles réflexions peux-tu en tirer ?
Il demeure mon modèle absolu, et bien que les dialogues entre nous furent peu nombreux, une connexion très forte fut toujours là. Cependant, mon identité en tant que Khmer m’interpellera seulement vers l’adolescence.
Par la suite, étudiant alors en A.E.S à l’université PARIS 13, un déclic t’amènera à abandonner cette voie pour t’inscrire à l’université PARIS 8 et commencer dans le monde des médias et du cinéma. Explique-nous cette révélation.
La pression familiale et mon environnement de l’époque me dictaient une voie pré - établie, mais étant un « story teller » dans l’âme, je pris la soudaine résolution de tout faire pour poursuivre mes rêves.
Puis en 2005 tu réalises le projet PARIS LA MÉTISSE. De quoi s’agit-il ?
Ma 1re grande expérience : Il s’agit d’un film collectif réalisé par une sélection de 15 réalisateurs étrangers, dont je fis partie, exprimant leurs visions respectives ainsi que leur ressenti d’un Paris Cosmopolite.
Ce projet me permettra entre autres de mettre en avant les avantages et inconvénients de la culture khmère, confrontée aux mélanges des cultures.
En 2007 tu crées RENOASH avec quatre amis, un projet que vous mènerez durant cinq ans. Peux-tu nous en décrire le sujet ?
L’idée était de créer une synergie s’orientant vers la création de films indépendants, réalisés par des personnes asiatiques ou de couleur noire, et mettant le peuple en avant
Quelles conclusions en as-tu retenues ?
Ce projet a définitivement élargi ma vision de ce métier et m’en a solidifié les bases.
Nous passons désormais en 2012 que tu décris comme UNE ANNÉE CHARNIÈRE. Pourquoi ?
La fin de notre association RENOASH m’oblige pour la 1re fois à reconsidérer mes directions en tant que, désormais, personne travaillant seule.
2015 marque un nouveau déclic dans ta vie et ta carrière. Dans quelle mesure ?
Je renoue contact avec l’un des membres de RENOASH - Jimmy LAPORAL TRÉSOR, et nous commençons à repenser des projets.
2017 t’amène vers de nouvelles directions avec l’entrée dans GRAND PÔLE MÉDIA et ce qui ils surnomment LE LAB, et tu y réalises LOKROU. Pourrais-tu nous parler de cette nouvelle expérience ?
Le lab peut se décrire comme un incubateur de talents. Ma créativité est alors au somme et je mets en place LOKROU, une aventure interactive (inspirée par ma famille) se déroulant durant la prise de Phnom Penh par les Khmers rouges… et je remporte le prix du Lauréat.
La même année est empreinte d’événements phares comme la rencontre avec Manuel CHICHE de JOKER FILMS. Comment la qualifierais-tu ? Que t’a-t-elle apporté jusqu’à ce jour ?
Je la qualifierais de décisive et fondamentale. Il demeure à ce jour mon pilier.
Aujourd’hui un nouvel horizon s’ouvre à toi avec la sortie du film les RASCALS : quels sont les principaux messages que ton équipe et toi même désiraient faire passer ?
Cette nouvelle exposition médiatique me permettra avant tout de mettre en avant le Cambodge et la culture khmère, mais aussi l’amitié et le vivre ensemble, ainsi que tous les obstacles gravitant autour de ces valeurs.
Qu’elles ont été les grandes difficultés a la réalisation de ce film ?
Traitant d’un sujet sensible et sensiblement profond, probablement dur à visionner pour certains, les plus grosses difficultés furent :
de retranscrire nos visions sur papier
de trouver du financement pour de tels sujets
Quelles en ont été tes plus grandes joies ?
Tout simplement la concrétisation de ce film, que je qualifierai de totalement fidèle à mes écrits, avec une 1re fois pour une grande partie des intervenants.
Ce film étant forgé notamment autour du racisme, aurais-tu des réflexions quant à la place des asiatiques en général, et des Khmers en particulier dans cette industrie ?
Cela a été plus ardu que prévu, car peu d’Asiatiques se présentèrent finalement aux castings…serait-ce par peur d’un manque de perspectives et d’être continuellement cantonné dans des rôles clichés ‘?
Le fait également qu’il n’y ait que peu de scénaristes, d’auteurs ou de réalisateurs asiatiques, donc l’appréhension d’être incompris.
Enfin quels conseils donnerais-tu à celles et ceux qui aimeraient s’engager dans cette voie ?
Maintenir ses convictions, ne jamais baisser les bras, s’inspirer au maximum de tout ce qui nous entoure… ET TRAVAILLER DUR
Propos recueillis par Chantha R
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