Stabilité politique assurée, mais préoccupations économiques, véhicules électriques, IDE et dettes, renforcement des liens entre le Japon et la Chine, taxes, croissance des investissements, délégations de Hong Kong et du Royaume-Uni pour stimuler la collaboration économique, sont quelques-uns des sujets détaillés dans cette revue économique.
PERC : stabilité politique assurée, mais préoccupations économiques
Une évaluation indépendante a été commandée par NagaCorp Ltd. et réalisée par Political and Economic Risk Consultancy Ltd. L’une des principales préoccupations du Cambodge à l’aube de 2024 est l’identification des risques économiques, comme le détermine le PERC. L’étude, qui a examiné une série de facteurs politiques, sociaux et macroéconomiques, s’est concentrée sur l’environnement d’investissement entourant les activités de NagaCorp dans les domaines du casino, de l’hôtellerie et du divertissement.
Stabilité politique après la transition du pouvoir
Les conclusions de l’étude indiquent que le paysage politique du Cambodge est stable depuis la transition en douceur de l’ancien Premier ministre Hun Sen à son fils, Hun Manet. Cette transition, ainsi que le soutien solide des différentes factions du Parti du peuple cambodgien (PPC), a contribué à maintenir un environnement politique sûr pour les investisseurs locaux et étrangers. En outre, le leadership de Hun Manet se caractérise par le fait qu’il s’appuie sur un groupe restreint de conseillers de confiance et qu’il s’engage de plus en plus auprès des dirigeants du secteur privé pour s’assurer que les préoccupations des entreprises sont prises en compte.
Les défis économiques en 2024
Néanmoins, malgré la stabilité politique, l’étude du PERC souligne que le Cambodge est confronté à des défis économiques considérables. L’économie du pays ne s’est pas encore totalement remise de l’impact de la pandémie et les projections indiquent que la croissance restera inférieure aux niveaux d’avant la pandémie dans un avenir proche. Des facteurs externes, notamment une réduction de la demande d’exportations cambodgiennes aux États-Unis et en Europe, un ralentissement de l’activité économique chinoise et la persistance de conflits mondiaux, continuent d’entraver la reprise économique du Royaume. Le rapport indique que ces risques externes échappent largement au contrôle du gouvernement cambodgien, ce qui rend leur approche à court terme difficile.
Les secteurs de la construction et de l’immobilier, qui ont joué un rôle déterminant dans l’expansion économique du Cambodge, traversent actuellement une période de réajustement. En particulier, les marchés des condominiums de luxe et des bureaux ont connu des difficultés importantes, tandis que la faible croissance des salaires et la création limitée d’emplois devraient avoir un impact négatif sur les dépenses de consommation.
« En outre, le secteur financier est confronté à des défis considérables, notamment une augmentation des prêts non productifs, qui pourrait potentiellement mettre en péril la stabilité générale de l’économie. »
Ces facteurs, associés à une faible demande d’exportations et à un déclin du tourisme en provenance de la Chine continentale, indiquent que la croissance globale du Cambodge en 2024 restera modérée.
Les infrastructures et la productivité du travail restent des préoccupations majeures
Le rapport identifie plusieurs développements potentiels qui pourraient avoir un impact positif sur l’économie cambodgienne dans les années à venir. L’un de ces facteurs est l’augmentation potentielle de l’investissement direct étranger résultant de la diversification des chaînes d’approvisionnement des multinationales et de la réduction de leur dépendance à l’égard de la Chine. Cette tendance pourrait attirer de nouveaux investissements dans les secteurs de la fabrication et de l’exportation au Cambodge. En outre, le secteur du tourisme a montré des signes de reprise, avec un nombre croissant de visiteurs en provenance de Russie, d’Europe de l’Est et des pays voisins de l’ASEAN.
Cependant, les infrastructures restent une préoccupation majeure pour les investisseurs
Le coût élevé des services publics, en particulier de l’électricité, associé à des systèmes de gestion des déchets encore perfectibles et à un entretien insuffisant, reste un obstacle important à la croissance.
Le rapport souligne également que la dépendance du Cambodge à l’égard du charbon pourrait changer à mesure que le nouveau gouvernement explore des alternatives énergétiques plus vertes, ce qui pourrait profiter à des secteurs tels que le tourisme durable.
La productivité du travail au Cambodge a diminué depuis la pandémie, principalement en raison d’un déplacement de la main-d’œuvre des emplois manufacturiers à forte productivité vers des secteurs à plus faible productivité comme l’agriculture. Le rapport souligne que l’amélioration du système éducatif cambodgien sera cruciale pour la croissance économique à long terme, mais que les progrès devraient être lents.
Si l’évaluation globale de la stabilité politique du Cambodge est positive — le pays reste plus stable qu’on ne le dit parfois — il sera essentiel d’aligner ces perceptions sur la réalité pour attirer de nouveaux investissements.
Les véhicules électriques ont encore un long chemin à parcourir
Pour les huit premiers mois de 2024, le Cambodge a immatriculé 3 676 véhicules électriques (voitures, motos ou « tuktuks »). En juin, ce chiffre était inférieur au seuil symbolique de 3 000 véhicules ; moins de 1 000 véhicules circulaient sur les routes cambodgiennes en 2023. Les principales marques croisées sont BYD, Toyota et Tesla.
Dans le même temps, le pays compte plus de 7 millions de véhicules, dont 85 % de motos et 10 % de voitures. Néanmoins, le gouvernement a réaffirmé son ambition de neutralité carbone à l’horizon 2050. Il prévoit de mettre en circulation jusqu’à 30 000 véhicules électriques (70 % de motos électriques et 40 % de voitures). Le ministère de l’Économie a également annoncé des mesures financières visant à faciliter l’achat de VE. Quant au ministère de l’Énergie, il propose de plafonner le prix de la recharge, avec une marge suffisante pour attirer les investisseurs privés à développer des stations de recharge.
IDE et dettes : fausses joies et fausses alertes
Lors des discussions entre le Cambodge et une délégation canadienne, le gouvernement a déclaré que le Cambodge avait attiré 7,5 milliards USD d’investissements directs étrangers en 2023. Cela représente une augmentation de 161 % par rapport à la même période sous le gouvernement précédent, aurait précisé le Cambodian Investment Council.
Cette annonce est surprenante dans la mesure où les chiffres des investissements directs étrangers pour le deuxième trimestre n’ont pas encore été publiés. Ce n’est pas le cas des chiffres de la dette. Elle s’élève à 11,27 milliards USD (soit 27 % du PIB) contre 10,9 milliards USD fin 2023.
« Cette dette reste modeste. Le ministère de l’Économie et des Finances (MEF) précise qu’elle est composée à 56 % de prêts concessionnels et qu’elle sert principalement à financer les infrastructures. »
Dans son plan pour 2024-2028, le ministère de l’Économie et des Finances — et c’est nouveau — a prévu d’emprunter entre 2,3 et 2,7 milliards USD par an. Cependant, il vise toujours des financements concessionnels, qu’ils soient bilatéraux ou multilatéraux, mais ne semble pas envisager d’émettre des bons du Trésor.
Le Japon et la Chine renforcent leurs liens
Le Japon et la Chine renforcent leurs liens par la mise en œuvre de technologies vertes et de projets d’infrastructure. Le Japon continue d’être un partenaire économique essentiel pour le Cambodge, en particulier dans le domaine du développement durable. Le 7 août, l’Organisation japonaise du commerce extérieur (JETRO), l’organisme japonais chargé du commerce extérieur, a organisé une mission commerciale à Phnom Penh, à laquelle ont participé 19 entreprises spécialisées dans les technologies vertes et les crédits carbone.
« Cette collaboration est conforme à l’objectif du Cambodge d’augmenter la proportion d’utilisation d’énergie propre à 70 % d’ici 2030. »
La Chine, première source d’investissements directs étrangers (IDE) au Cambodge, a exprimé son engagement continu à étendre sa présence dans le Royaume. À la mi-août, une délégation de la province de Jiangsu a effectué une visite dans le but d’explorer les possibilités de collaboration dans les domaines de l’agriculture, de la technologie et de la pêche. Le Premier ministre cambodgien, Hun Manet, a exprimé son soutien à la poursuite de la collaboration, en particulier à la réouverture des vols directs entre le Cambodge et Shantou, qui, selon lui, stimulerait le commerce et l’investissement bilatéraux.
Trois ans d’exonération pour les compagnies aériennes
Le ministère de l’Économie et des Finances vient d’annoncer une réduction des taxes affectant les compagnies aériennes étrangères. La taxe sur les avions étrangers volant au Cambodge passe de 14 % à 10 %, et la taxe sur les services de transport aérien de passagers passe de 10 % à 5 %. Ces réductions sont valables du 1er juin 2024 au 31 mai 2027. Ces mesures visent à augmenter le nombre de vols desservant les aéroports cambodgiens et donc l’arrivée de touristes. En effet, le secteur peine à retrouver son niveau d’avant la pandémie (6,6 millions de touristes en 2019). Pour la période de janvier à juillet 2019, 3,9 millions de touristes ont visité le Cambodge ; 3,6 millions en 2024. L’ouverture de six nouvelles routes vers l’aéroport international de Siem Reap en provenance de Chine, de Corée et d’Inde est à l’étude. Elles seraient opérationnelles en 2025. Il reste que la fiscalité appliquée aux bénéfices des compagnies aériennes étrangères s’écarte sensiblement des pratiques internationales, ce qui constitue également un obstacle à leur retour.
Forte croissance de l’investissement (CDC)
Au cours des 11 premiers mois du mandat du Premier ministre Hun Manet, un total de 237 projets d’investissement, d’une valeur combinée de plus de 6 milliards USD, ont été approuvés, ce qui représente une augmentation de 220 % du capital par rapport au mandat précédent. Pour le seul mois de juillet 2024, 44 projets d’une valeur totale de 396 millions USD ont été approuvés.
Cette augmentation des investissements est attribuée à un certain nombre de facteurs, notamment les politiques économiques favorables du Cambodge, la jeunesse de sa population et la stabilité politique. Le climat d’investissement au Cambodge suit une trajectoire ascendante perceptible. Selon Michael Tan, PDG fondateur d’Aquarii BD Cambodia, la continuité politique, l’emplacement stratégique et les incitations favorables sont autant de facteurs qui contribuent à la création d’un environnement commercial plus dynamique et plus attrayant pour les investisseurs mondiaux.
Les délégations de Hong Kong et du Royaume-Uni souhaitent stimuler la collaboration économique
Fin juillet 2024, une délégation de Hong Kong, composée de 30 dirigeants des secteurs de la finance, de l’assurance et de la technologie, a visité Phnom Penh dans le but de renforcer les liens économiques. À la suite de la visite, 13 mémorandums d’entente (MoUs) ont été signés, axés sur des questions relatives au commerce, à la banque, à l’innovation et à la technologie. Cela représente une avancée significative dans l’objectif du Cambodge de promouvoir son économie numérique. De plus, l’UK Export Finance (UKEF), l’agence de crédit à l’exportation du gouvernement britannique, a exprimé un intérêt considérable à soutenir le développement des infrastructures au Cambodge. Lors de leur visite début août, l’UKEF s’est engagé à financer des projets dans les services publics et l’infrastructure dans le cadre du Partenariat d’Investissement Britannique, indiquant une augmentation potentielle des investissements britanniques au Cambodge.
Sources : PERC, Aquarii et Brèves ASEAN
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