On les trouve partout au Cambodge, devant les maisons en bois sur pilotis de la campagne ou sur la façade des immeubles de Phnom Penh. Elles sont colorées et déclinées en une multitude de formes et de styles.
D'une manière générale, les maisons des esprits sont des sanctuaires dédiés à l'esprit protecteur d'un lieu. On en trouve également dans d'autres pays d'Asie du Sud-Est, notamment en Birmanie, Laos et Thaïlande.
Au Cambodge, la plupart des maisons et des entreprises possèdent une maison des esprits placée, le plus souvent la forme d'une maison miniature ou d'un petit temple, généralement monté sur un pilier ou sur une estrade. Les maisons spirituelles vont de simples structures coûtant quelques dizaines de dollars à des édifices élaborés dont le prix peut atteindre 5 000 dollars.
Nombreux sont ceux qui affirment que ces petites structures sont la demeure des esprits et des dieux et qu'elles ont pour mission fondamentale de rendre ces êtres surnaturels heureux et à l'aise. En échange, les esprits bienveillants gardent les habitants humains de la maison à l'abri du danger et hors de portée des mauvais esprits. Il s'agit d'une relation mutuellement bénéfique : les gens construisent la maison des esprits pour accueillir les divinités et ceux-ci protègent les occupants.
Une autre fonction de ces jolies petites structures, plutôt dans la tradition bouddhiste, est de témoigner du respect aux personnes récemment décédées. Les fidèles pensent que le fait de déposer des offrandes dans les maisons des esprits porte chance aux personnes récemment décédées qui attendent leur réincarnation. Les offrandes comprennent des guirlandes de fleurs, de la nourriture (riz, fruits et gâteaux khmers) et des bâtons d'encens.
Dans les régions les plus reculées du Cambodge, certaines communautés autochtones croient que les plantes et les animaux ont des esprits. Pour eux, cet édifice miniature joue un rôle beaucoup plus important dans la vie quotidienne. Selon leurs croyances, les défunts doivent exister en tant qu'esprits dans les forêts jusqu'à leur réincarnation. Ces minorités veillent à ce que ces esprits vivant dans la forêt soient heureux : elles y déposent quotidiennement des offrandes.
Il existe une dernière fonction que les maisons des esprits remplissent à notre époque en constituant un ornement, un objet décoratif destiné à embellir le jardin ou l'entrée et à susciter l'admiration des voisins et passants.
Les maisons spirituelles peuvent être divisées en deux catégories. Le terme « neak ta » désigne celles qui sont construites pour et par la communauté. Leur rôle est communautaire, car elles sont censées attirer la chance pour tous les voisins et tenir à distance les esprits menaçants. Les maisons des esprits construites pour une famille individuelle sont généralement appelées « tevada » et sont celles que l'on observe le plus à Phnom Penh ou Siem Reap. Dans Phnom Penh, le standard est une maison des esprits toute faite : un petit temple doré au sommet d'une estrade.
Mais, dans la campagne cambodgienne, il existe de nombreuses variantes : un simple poteau de bambou fendu au sommet pour recevoir les offrandes et décoré de rubans ou quelques pierres posées sur le sol.
Les historiens s'accordent généralement à dire que la pratique de la construction de maisons des esprits est antérieure à l'époque angkorienne (802-1431) et qu'elle existait déjà en tant qu'expression de l'animisme. Les maisons des esprits ont probablement joué un rôle très important pour les gens de cette époque. Certains chercheurs affirment qu'elles étaient considérées comme une source de conseils et d'assistance en cas de problèmes. On leur prêtait des qualités magiques : elles pouvaient modifier le temps, guérir les maladies et aider à retrouver les objets perdus. Elles constituaient un élément important du système judiciaire : les suspects devaient prêter serment devant la maison des esprits.
Bien que celle-ci n'ait plus un rôle aussi important dans la communauté, elle est toujours respectée et nécessaire, et a donné naissance à une activité artisanale florissante. Sur les routes principales de la capitale, on croise fréquemment des ateliers spécialisés dans cet objet ornemental et religieux, avec des centaines de maisons spirituelles de toutes tailles soigneusement alignées.
Kommentare