Le Cambodge compte plusieurs milliers de pagodes à travers le pays, mais les temples historiques, antérieurs au XIXe siècle, sont rares.
En effet, pendant des siècles ces bâtiments furent construits en bois. Le climat tropical du Cambodge rendait ce matériau très périssable et le temps aura eu raison d’eux, faute aussi d’un entretien suffisant. Par ailleurs, la terrible parenthèse des Khmers rouges aura fini de les anéantir, un très grand nombre de pagodes ayant été détruites pendant cette période. Le protectorat français apporta le béton armé à la fin du XIXe siècle, et les pagodes seront désormais bâties de ce matériau.
La pagode du vat Moha Leap, dans la région de Kampong Cham aura résisté ; elle aurait été utilisée comme hôpital par les Khmers rouges, et cette occupation l’aura sans doute sauvée. D’après Danielle et Dominique-Pierre Gueret, auteurs d’une monumentale recherche sur les monuments d’architecture religieuse au Cambodge, le vat Moha Leap est très certainement le seul temple entièrement construit en bois qui subsisterait aujourd’hui dans le pays.
Ils le datent antérieurement à 1880. Le temple a fait l’objet d’une rénovation récemment achevée. Nous avons eu l’honneur d’être sans doute parmi les tout premiers visiteurs à le découvrir dans toute sa splendeur, à l’été 2017.
Depuis Kompong Cham, après plus de deux heures de tuktuk sur des pistes en latérite traversant d’immenses forêts d’hévéa, nous atteignons le village sur la rive du Tonlé Touch. La pagode semble désertée en cette fin de matinée du mois d'août. Nous rencontrons par chance trois jeunes garçons qui trouvent les clefs et nous ouvrent le vihara. À l’intérieur, nous sommes émerveillés par une forêt de poteaux en teck, peints en noir et décorés de motifs au pochoir en or.
Ces poteaux soutiennent l’énorme charpente et divisent le bâtiment en cinq nefs. Chacun d’entre eux serait fait d’un seul tronc de teck. Les peintures des pannes et chevrons, ainsi que celles du plafond sont d’origine.
La petite rivière n'est navigable que de juillet à décembre; à d'autres moments, il est plus prudent de voyager par voie terrestre. Sans guide, il est assez préférable alors d'avoir quelques notions de khmer pour demander le chemin, car on trouve beaucoup de petits virages en cours de route. Autrement, la majorité des chauffeurs de tuktuk connaissent cet endroit. Texte et photographies par Francis Goussard
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