Spécialisée dans le développement international, chef de projet dans une ONG locale, grande sportive, Anya Minko est aussi une artiste-peintre qui proposera sa première exposition solo mercredi prochain à la galerie Sra'Art.
Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?
Oui, je m’appelle Anya, je suis australo-thaïe et suis arrivée au Cambodge à l’âge de trois ans. Cela fait donc 21 ans que je vis dans le pays. Mais j’ai été absente pendant environ huit ans. Je ne suis revenue que l’année dernière. En ce moment, je me concentre sur mon art. j’ai toutefois une activité professionnelle, je suis actuellement cheffe de projet dans une ONG Cambodgienne, je me concentre sur l’installation de potagers dans les écoles publiques. C’est un moyen magnifique, très simple et efficace d’améliorer les installations scolaires, n’est-ce pas ?
Parlez-nous de votre parcours scolaire
Je suis titulaire d’une licence en études internationales du Royal Melbourne Institute of Technology. J’ai choisi cette filière parce que je m’intéresse à beaucoup de choses.
J’aime l’art, mais aussi le développement international et la politique. C’est donc mon domaine d’études. Mais je dirais que c’est un peu trop large...
Quel a été votre premier emploi ?
J’ai aidé au développement du basket-ball féminin cambodgien en fauteuil roulant. C’était avec mon père, je n’avais que 17 ans à ce moment-là, mais j’ai vraiment aimé ce job parce qu’il me permettait de travailler sur le terrain. J’allais au basket-ball, j’aidais à recruter les athlètes féminines.
Ensuite, j’ai été institutrice de maternelle pendant deux ans. J’ai aussi été journaliste indépendante pour un quotidien local à un moment donné. Et entre-temps, j’ai essayé de faire de l’art. J’ai effectué des travaux de commande en freelance, comme des conceptions graphiques.
Quand les arts ont-ils vraiment commencé à vous attirer ?
Les arts m’ont toujours attiré. Dès mon plus jeune âge, j’ai toujours voulu être une artiste. J’aime l’art et beaucoup d’autres choses encore. Je pense que je ne suis heureuse que si je fais un peu de tout. Par exemple, j’adore mon travail d’installation de potagers. C’est un travail qui a beaucoup d’impact et j’aime travailler avec les communautés locales. J’aime travailler avec les Cambodgiens dans les villages. C’est amusant. J’adore cela. Mais je suis aussi définitivement passionnée par l’art.
Je crois que c’est la raison pour laquelle je suis généralement assez stressée parce que j’ai beaucoup d’intérêts différents. Et vous savez, certaines personnes me font envie. Ils n’ont qu’un seul centre d’intérêt, ils s’y spécialisent et c’est tout. Je suis un peu : « oh, je suis prêt à essayer ceci, je suis prêt à essayer cela ».
Pourquoi la peinture en particulier ?
Avant, je produisais beaucoup de dessins au trait. J’aime les crayons de couleur, les ombres. Mais pour ma prochaine exposition, il n’y a que des peintures acryliques bien que je sois assez novice dans cette discipline. Pour ma toute première œuvre, j’ai acheté une grande toile et j’ai commencé à peindre après être allée à Memot pour leur festival de pêche traditionnelle.
Comment définiriez-vous votre style ?
Je le définirais comme étant à la fois très chaotique et très structuré. Car si vous y regardez de plus près, il y a une structure. Il y a beaucoup de lignes fines, de motifs répétitifs, très fluides.
Mais si vous regardez rapidement, ce n’est pas le cas. J’aime utiliser des couleurs vives. Pour moi, chaque pièce est une expérience parce que j’y vais sans réelle intention. Et c’est ainsi que j’aime produire de l’art. Je commence donc par des coups de pinceau très désordonnés ou par de la couleur à l’arrière-plan. Puis je laisse les choses se dérouler « organiquement », là où ma main m’emmène, parce que ce que j’ai en tête au départ ne ressemble pas à ce que j’ai fait une fois terminé, parce que je change de trajectoire en permanence.
Que représente la peinture pour vous, quelle serait votre inspiration ?
En ce qui me concerne, je pense que les gens réfléchissent trop à la peinture. Alors que pour moi, c’est comme une forme de méditation.
« C’est comme si je m’éteignais. Je ne pense plus. Je me laisse porter par le cours de l'eau. »
Parce dans la vie courante, nous devons toujours nous concentrer, penser. Il y a tellement de pression pour que les choses soient faites. Alors que pour moi, l’art est comme mon temps de solitude où je ne pense à rien. Et je me sens en confiance parce que c’est mon style et que je n’utilise pas de référence ou quoi que ce soit d’autre. C’est pour cela que j’aime l’art, car il n’y a pas de limites. Je peux faire ce que je souhaite.
S’agit-il de votre première exposition ?
Oui, c’est ma première exposition en solo. Je suis ravie, mais pas vraiment nerveuse, car je veux que ça se fasse. En clair, j’ai arrêté pendant un certain temps. À présent, je me suis dit que si je ne le faisais pas maintenant, les années passeraient et je le regretterais. Alors si je peux le faire maintenant, et avoir ma première exposition solo, en espérant qu’il y en aura d’autres à l’avenir, alors au moins je me sentirai bien dans ma peau.
Êtes-vous perfectionniste ?
Je ne suis jamais satisfaite, je peux être heureuse, mais pas satisfaite. Je pense que cela dépend de l’œuvre. Je crois que l’un des grands problèmes de l’artiste, c’est que lorsqu’on crée, il faut savoir s’arrêter. Parfois, je déteste les premiers coups de pinceau, puis je me dis que je peux y revenir une semaine plus tard.
Heureuse de cette première exposition solo ?
Oui, je suis très heureuse, oui. Parce que je veux que les gens puissent découvrir mes mon art différemment qu’à travers un catalogue en ligne.
En dehors des arts et de votre travail, quelles seraient vos autres passions ?
J’adore faire du vélo, de longues balades jusqu’à la périphérie de Phnom Penh. J’aime beaucoup ce sport parce que non seulement je me maintiens en forme, c’est bon pour l’environnement, mais aussi parce que cela me permet d’explorer tant d’endroits que je ne verrais jamais avec un autre moyen de locomotion. Avant de revenir ici, je vivais à Bangkok et j’y faisais du vélo tous les jours.
Avez-vous des influences en matière de peinture ?
J’ai toujours aimé Dali depuis que je suis toute petite, mais je dois dire que je n’ai pas beaucoup de références parce que je préfère regarder moins d’œuvres d’art pour pouvoir créer librement, sans influence, mes propres œuvres. J’ai l’impression que si je suis exposée à trop d’œuvres, je finirais par les copier.
Votre avis sur l’hyperconnexion, les réseaux sociaux...?
Je ne suis pas très accro à tout cela, c’est utile pour mes activités professionnelles, mon art, mais rien d’autre. Je suis encore jeune et je préfère passer mon temps libre à faire du sport qu’à rester assise devant un écran.
Qu’est-ce que vous aimez au Cambodge ?
Il y a des choses qui peuvent se révéler dysfonctionnelles, agaçantes, répétitives, mais on est souvent agacé par les choses auxquelles on tient le plus. Je veux dire que j’aime le Cambodge pour ses habitants, mais aussi parce que je parle couramment le khmer.
Même si je ne suis pas Cambodgienne, je suis arrivée très jeune et pour moi, le Cambodge n’est pas une expérience exotique. J’ai toujours aussi été comme cela à cause de la façon dont mon père m’a élevée. Il s’est aussi assuré que je sois exposée à un large éventail de personnes différentes, donc je pense que le Cambodge m’a aussi façonnée pour que je devienne ce que je suis.
Quelles sont vos attentes pour l’avenir ?
Oh, ce que je veux, c’est devenir une artiste, exposer davantage, vendre des œuvres, mais je veux aussi continuer à me concentrer sur mon travail. Je pense que c’est un projet très gratifiant.
J'aimerais aussi devenir « influenceuse cycliste » Quand je vivais à Bangkok, j’avais ma GoPro et j’ai filmé tellement d’images de mes déplacements à vélo. Toutefois, le montage prend tellement de temps que c’est aussi une chose que j’aimerais faire un peu plus tard. Mais je veux encourager les gens à faire du vélo. Je suis une fanatique de ce sport et je pense que la seule façon de convaincre quelqu’un de faire quelque chose, c’est d’en parler. Et petit à petit, de plus en plus de gens font du vélo, comme ceux que je fréquente.
Dernière question, que diriez-vous pour attirer les gens à votre exposition ?
Je pense que l’art est différent pour tout le monde et je pense que mon art apportera une interprétation différente de celle des autres parce qu’il est très abstrait et je crois qu’il faut prendre le temps de le comprendre. Je pense donc que si vous êtes enthousiastes à l’idée de voir des peintures non structurées où vous pouvez avoir votre propre interprétation, alors vous devriez venir à mon exposition.
Mercredi 25 septembre 2024
À la galerie Sra'Art
À partir de 6 h 30
Comments