C’est un jardin botanique comme il n’en existe qu’un seul à Siem Reap, et même au Cambodge. Sur une surface de 15 hectares, herbes aromatiques, fleurs, arbres, insectes et animaux se côtoient au gré des sentiers sinueux.
L'Angkor Botanical Garden symbolise un nouveau jalon dans la métamorphose amorcée par une cité des temples en plein bourgeonnement. Visite guidée en compagnie de S.E. Yit Chandaroat, vice-président de l’Autorité APSARA et responsable du nouveau jardin botanique.
Un jardin aux grandes ambitions
Pendant plusieurs semaines en 2020, 80 ouvriers s'étaient mobilisés sur le chantier pour ouvrir en mai 2022. Comme l’expliquait Mr Yit Chandaroat, qui supervise l’aménagement des lieux depuis 2018. C’est à cette date qu’avait été prise la décision d’agrandir le petit jardin des épices préexistant, impulsée conjointement par le Ministère de l’Aménagement du territoire et l’autorité APSARA. « Depuis le début, les buts sont restés les mêmes : collecter le plus grand éventail possible d’espèces endémiques au Cambodge afin non seulement de les préserver, mais aussi de faire connaître ces trésors végétaux au plus large public. Ce jardin botanique est destiné tant aux touristes qu’à la population locale, et concentre en un seul lieu l’incroyable variété de la flore du royaume. »
Une étape sur la route des temples
Avec son entrée principale donnant sur l’avenue Charles de Gaulle, le jardin se situe sur la route des temples d’Angkor et marque incontestablement une étape pour de nombreux visiteurs. Ces derniers ne seront pas déçus, tant la promenade s’avère rafraîchissante et agréable. Rien n’a été laissé au hasard dans l’aménagement des cinq espaces thématiques qui jonchent le parcours, entrecoupés de bassins, de cascades et de petites collines.
« Tout a été fait dans le respect le plus total de l’environnement : panneaux solaires, eau des bassins et de l’arrosage venant de la rivière toute proche et non des nappes phréatiques, respect de la faune et de son habitat naturel… Nous n’avons pas ménagé nos efforts ! »
« Se transformer en jardinier-paysagiste »
Plantes médicinales et épices, fleurs ornementales, jardin cambodgien, palmeraie et espace dédié à la faune forestière rythmeront la visite. Une faune qui n’a d’ailleurs pas attendu pour s’inviter dans les bosquets, remplis d’oiseaux et de papillons aux couleurs chatoyantes. Sourire aux lèvres, Mr Yit Chandaroat décrit méticuleusement toutes les parcelles, dont il a amoureusement surveillé la création. « Lorsque l’agrandissement du jardin des épices a été décidé, nous avons établi un plan directeur que j’ai par la suite modifié par plus ou moins grandes touches, raconte-t-il dans un impeccable français. Des bassins ont été ajoutés, des petites maisons de bois, des éléments décoratifs se référant aux traditions cambodgiennes et toutes sortes d’agréments visant à rendre le jardin attractif. Je me suis littéralement transformé en jardinier-paysagiste, tout en puisant l’inspiration parmi les plus beaux jardins botaniques du monde, comme ceux de New York, Singapour ou Londres. »
Faire rimer botanique avec didactique
Plus de 500 espèces peuvent être contemplées, du plus petit cactus aux arbres majestueux, en passant par les épices et les ananas.
« Savez-vous qu’il existe au Cambodge des dizaines d’espèces différentes de manguiers, de bananiers, ou encore de cannes à sucre ? Il en va de même pour les palmiers, auxquels tout un espace est consacré. Le patrimoine végétal du Cambodge est exceptionnel à plus d’un titre, mais largement méconnu en comparaison de son patrimoine historique. Pourtant, les deux sont liés : ces arbres, ces plantes faisaient déjà partie du paysage angkorien. Nos ancêtres les cultivaient, les consommaient, se soignaient avec… C’est aussi cela que nous désirons apprendre aux visiteurs. Dans ce but, une série de panneaux explicatifs est déployée », annonce Yit Chandaroat en indiquant de la main les derniers aménagements à effectuer. La promenade n’en est pas pour autant uniquement didactique : le café-restaurant avec sa terrasse, les nombreux bancs ainsi que les différentes ambiances conviennent parfaitement aux balades en couple ou en famille, aux amoureux des espaces verts ainsi qu’aux « instagrameurs » en quête de selfie.
En visant un public le plus large possible, Yit Chandaroat espère faire de cet espace un lieu incontournable de Siem Reap.
Symbole d'une nouvelle étape
L’ouverture de ce jardin s'est inscrite dans un contexte particulièrement riche pour la ville. Après avoir considérablement souffert du manque de touristes suite à la pandémie et avoir connu une année de gigantesques travaux d’urbanisme, Siem Reap revêt désormais ses plus beaux atours pour accueillir des visiteurs enfin de retour. Il en va de même dans les temples et leurs environs, comme l’explique Mr Yit, citant en exemple les récents aménagements du parvis d’Angkor Vat, de la Terrasse des Éléphants, la rénovation de la Porte ouest d’Angkor Thom ou encore la création de 30 kilomètres de pistes cyclables.
« Nous fourmillons de nouveaux projets », confie celui qui, en plus de ses fonctions de vice-président, est aussi chargé de la gestion et du développement des infrastructures et du paysage dans les zones APSARA. Créée en 1995, cette institution forte de 3.000 employés veille sur tous les aspects relatifs aux patrimoine historique angkorien.
« Le travail a triplé durant le Covid. L’absence de touristes nous a décidé à entreprendre des travaux que nous aurions normalement étalé sur plusieurs années. En dehors des réalisations précédemment citées, nous sommes aussi en train de déplacer la route autour du temple de Takeo, qui recouvrait auparavant ses douves. Le même état d’esprit a présidé lors de la création de la nouvelle passerelle qui mène à l’îlot de Neak Pean. L’ancien accès débouchait directement sur le monument, lui faisant perdre son caractère insulaire. De manière générale, les travaux d’aménagement qui ont eu lieu ces dernières années, ainsi que les projets futurs, visent à retrouver et à respecter la vision originelle des bâtisseurs angkoriens. »
Les 15 hectares occupés par le Jardin botanique seront peut-être un jour amenés à s’agrandir, allant jusqu’à rejoindre le temple d’Angkor Vat, situé à seulement une poignée de kilomètres de là. C’est tout du moins le souhait de Mr Yit Chandaroat, cette décision dépendant du succès du site.
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